Et le leader dans tout ça ?
En tant que dirigeant, puis-je simplement demander à mes collaborateurs de faire ‘comme avant’, avec un masque et quelques plexiglas ? Dois-je parler de la survie de mon entreprise ou de celle de Beyrouth ? Puis-je demander un total investissement de mes équipes dans un tel contexte ? N’ont-ils pas la tête ou le coeur ailleurs ou trop encombrés ?
J’ai pris un peu de temps, cet été, pour interroger une douzaine de dirigeants. Nombre d’entre eux veulent mettre toute l’énergie dans la relance, reprendre contact avec les clients et les prospects, tout en admettant que les clients sont parfois encore absents du paysage. D’autres ont compris que le moment était propice à la prise de hauteur pour éviter le risque d’une agitation stérile. Dans un monde complexe, l’usage de l’énergie doit être dosé. L’effet papillon est nettement plus rentable que l’effet tornade.
Super-héros ou confiance sociale ?
Même si le mythe du super-héros sauveur de l’organisation continue de vivre dans la conscience collective, les belles promesses du dirigeant ont du plomb dans l’aile. Vendre un avenir certain dans un monde fait d’incertitudes pourrait vous décrédibiliser un peu vite. Vouloir rassurer est certes une bonne intention mais encore faut-il savoir comment recréer une confiance solide. Celle-ci a été érodée pour de multiples raisons. Même si le problème n’est pas neuf, la crise l’a amplifié.
La méfiance envers les dirigeants (politiques et/ou économiques) et les médias, c’est-à-dire envers ceux qui sont censés guider et informer l'ensemble, a grandi. Si de plus, les quidams qui m’entourent sont devenus un danger potentiel, vers qui puis-je me tourner ? Ceci signifie que le collectif, le corps social de notre société civile, mais aussi le corps social des organisations, est à risque.
Vivre sereinement en ‘complexitude’ !
Rechercher des solutions à partir de l’inquiétude et d’une confiance vacillante amène peu d’idées vraiment rafraîchissantes et inspirantes. Par contre, créer les conditions pour faire naître l’état d’esprit qui permet de vivre plus sereinement dans un monde complexe est un atout majeur, pour cette crise et toutes les autres.
“Je ne sais pas et nous allons construire une solution.”
3 premières clés
Le premier pas consiste à accepter la complexité. Un système complexe est composé de nombreux éléments interagissants et interdépendants dont les résultats sont imprévisibles. L’accepter est déjà un signe de maturité. Certains y verront là la capacité à créer une culture de l’essai/erreur. Les meilleures équipes sont capables d’aborder très rapidement et très ouvertement les problèmes et les erreurs et de rectifier/adapter la situation pour répondre aux changements. Cela s’appuie forcément sur une qualité relationnelle et une sécurité psychologique intentionnelles.
Deuxième pas : Osez l’authenticité. Mieux vaut dire ‘je ne sais pas et nous allons construire une solution’ ensemble, que de chercher à rassurer par un plan quelconque mal ébauché. Il y a des exemples récents de ce qu’il ne faut pas faire dans l’actualité ! Autant éviter de les reproduire. Avancer dans la complexité, c’est aussi apprendre vite des erreurs des autres.
Le troisième pas : prenez soin des personnes et du collectif. L’humain est un animal ultra social. Le confinement a créé des traumatismes multiples, les médias ont entretenu un climat anxiogène et la crise a fait émerger des questionnements et des doutes. Il faut pouvoir les ‘déposer’. D’autre part, les humains sont toujours plus forts ensemble, c’est dans leur ADN. Lorsque le danger est flou ou lorsque les règles sont instables, ils trouveront les moyens de dépasser cet inconfort si le lien social est renforcé. Même si le contexte actuel est une vraie gageure, le renforcement du collectif est un ‘obligatoire’. Une première étape éprouvée consiste par exemple à rechercher les valeurs qui vous rassemblent, et pas juste les valeurs ‘corporate’ ou politiquement correctes. Là aussi, évitez l’information descendante. Si vous voulez éveiller l’intelligence collective, outil essentiel dans un monde complexe, ce travail est à faire ou refaire ENSEMBLE, avec légèreté et profondeur !
Dans nos prochains articles, nous approfondirons les 3 composantes essentielles de la confiance que sont la confiance en soi, la confiance stratégique et la confiance sociale et la façon dont elles interagissent.